Walid Regragui

Le 31 août a été un jour particulier pour Walid Regragui : celui de sa nomination au poste de sélectionneur du Maroc, en lieu et place de Vahid Halilhodžić. Premier constat : cela lui donnait moins de trois mois pour préparer son équipe pour le Qatar.

Halilhodžić a certes réussi à qualifier le Maroc pour la Coupe u Monde, mais dans les coulisses des Lions de l’Atlas, tout n’allait pas pour le mieux dans le meilleur des mondes. Des dissensions dans le vestiaire ont obligé le président de la Fédération royale marocaine de football, Fouzi Lekjaa, à remercier le coach bosnien, déclenchant ainsi une recherche effrénée d’un nouveau sélectionneur dans le but de ressouder un vestiaire désuni.

La recherche portait sur une personne capable à la fois de résoudre les problèmes internes et d’intégrer des joueurs du championnat national marocain dans l’effectif. Chargé de mission : Regragui. Âgé de 47 ans, Regragui n’a jamais eu la chance de jouer dans une Coupe du Monde au cours de sa carrière de joueur international, qui a duré de 2002 à 2011.

La raison ? Pendant cette période, les Lions de l’Atlas n’ont jamais réussi à se qualifier pour l’épreuve reine du football mondial. La ligne la plus prestigieuse du CV de Regragui en équipe nationale est la finale de la Coupe d’Afrique des Nations 2004, perdue de justesse face à la Tunisie, qui jouait à domicile.

L’intention de sélectionneur marocain aujourd’hui est de prendre une sorte de revanche en essayant de faire en sorte que les Lions de l’Atlas tirent leur épingle du jeu dans un groupe qui s’annonce compliqué. Regragui, qui a permis au Wydad de remporter la Ligue des champions de la CAF cette année, a parlé à la FIFA de sa philosophie en tant qu’entraîneur, de l’état de préparation de son effectif à quelques encablures de Qatar 2022, et des adversaires de son équipe dans le Groupe F.

Quand on lui a demandé de se présenter, il a répondu simplement : « Je suis Walid Regragui, ancien international marocain et aujourd’hui sélectionneur de cette équipe nationale ».

Comment avez-vous eu vent de votre nomination au poste de sélectionneur ?

Il y a eu beaucoup de spéculation autour de la possibilité de changer de coach, mais rien d’officiel. J’ai rencontré Lekjaa environ une semaine après l’annonce officielle, mais il ne m’a pas fait d’offre à ce moment-là. Nous avons évoqué différents scénarios pour l’équipe, présents et futurs. Évidemment, en tant qu’ancien international marocain, il est difficile de refuser le poste de sélectionneur du Maroc juste avant une Coupe du Monde. Je suis bien sûr très impatient que le tournoi débute. Ma nomination n’était pas planifiée. Tout est allé très vite et pour moi, la surprise était totale. Je venais tout juste de finir ma saison avec le Wydad, et ça été une grande réussite. Le poste d’entraîneur du Wydad a été une opportunité qui aura finalement porté ses fruits jusqu’au bout.

Quelles sont les caractéristiques de l’équipe du Maroc dont vous avez héritée ?

Il y a beaucoup de qualité. Nous avons la chance d’avoir des joueurs talentueux, qui ont pu gagner en maturité dans de grands clubs. Le peuple marocain devrait être fier de compter dans son équipe nationale des stars qui jouent la Ligue des champions avec des clubs comme le Bayern Munich, Chelsea ou le Paris Saint-Germain. Nous souhaitons que ça se passe le mieux possible pour eux dans ces grands clubs. Par conséquent, en termes de qualité, nous avons beaucoup de chance. Pendant les qualifications, nous avons montré que notre équipe était très solide et bien organisée. La mission désormais est de faire en sorte que notre système fonctionne pour pouvoir être compétitifs contre les grandes nations du football.

Un joueur comme Ayoub El Kaabi, que vous apporte-t-il ?

Ayoub est notre meilleur buteur et il trouve le chemin des filets dans toutes les équipes avec lesquels il joue. Il a marqué 18 fois pour Hatayspor la saison dernière et a été le meilleur buteur du Championnat d’Afrique des Nations. Il ne marque pas à chaque match, mais vous pouvez compter sur lui pour donner le meilleur de lui-même toutes les fois qu’il est sur le terrain. C’est une personne formidable.

Et Yassine Bounou ?

Bounou a remporté le trophée Ricardo Zamora en Espagne, ce qui veut dire qu’il est un des meilleurs gardiens du monde. Il est très sincère, c’est une très bonne personne. Pour l’instant, sa carrière est exemplaire, et c’est dû à son talent et à son éthique de travail. C’est l’un des meilleurs gardiens de but du monde, tout le monde le reconnaît. Je sais que nous pourrons compter sur lui à la Coupe du Monde.

Quelles sont les qualités d’Achraf Hakimi ?

Achraf est aussi rapide que le TGV, ou « Al Buraq », comme nous l’appelons au Maroc. Il va à la vitesse de l’éclair et c’est un athlète incroyable. Il a déjà joué pour des clubs comme le Real Madrid, Dortmund, l’Inter et le Paris Saint-Germain. Les gens oublient qu’il n’a que 23 ans. Malgré cela, c’est l’un de nos leaders, sur le terrain et en dehors.

Comment décririez-vous votre philosophie du football et votre style de jeu ?

Cela fait huit ou neuf ans que j’entraîne et ma philosophie est claire depuis le début. Avec le temps, j’ai progressé en termes de stratégie. J’avais l’habitude de beaucoup insister sur la possession et sur un pressing énergivore. Avec les années, je suis devenu plus pragmatique. Quand vous travaillez avec un club comme le Wydad, où tout ce qui compte est la victoire, il est indispensable de s’adapter pour ne rechercher que la victoire. Je compose en fonction du potentiel disponible au sein de l’équipe. Je peux adopter beaucoup de styles de jeu différents. J’admire Guardiola, Simeone et Ancelotti, mais j’ai aussi mon propre style qui me permet d’adapter l’équipe en fonction des qualités des joueurs disponibles.

Que pensez-vous du parcours de votre équipe en qualifications ?

Je tire mon chapeau à tous les joueurs. Rien à leur reprocher. C’est le genre d’équipe que tous les Marocains ont envie de voir, et qu’ils auront envie de voir également en Coupe du Monde. Ce n’est pas rien de se qualifier pour deux éditions de suite du tournoi et d’acquérir une sorte de régularité à ce niveau-là. Tout ce que je peux dire, c’est bravo à l’encadrement technique, à Halilhodzic, et bien sûr au joueur. Nos supporters aussi ont joué un rôle important pendant toutes les qualifications.

Où étiez-vous lors du match retour contre la RD Congo ?

J’étais en période de préparation pour la Ligue des champions. J’ai regardé ce match à la maison avec ma famille. Le match aller a été assez tendu, mais au retour les garçons ont réussi à faire la décision très tôt dans la partie. Au final, ça s’est bien passé, même si la première manche a été un peu compliquée. Nous avons rempli notre objectif, qui était de nous qualifier !

Pouvez-vous décrire l’atmosphère chez vous pendant le match retour ?

Vous pouvez imaginer. J’ai regardé le match aller avec ma famille proche et des amis. Nous avons tous hurlé de joie lorsque Tissoudali a égalisé. C’était un but important et d’ailleurs, j’aimerais le remercier pour sa contribution, d’autant plus qu’il va manquer la Coupe du Monde. Je lui ai dit que toute la nation lui était redevable et que nous n’oublierons jamais son but.

Qu’est-ce que cela signifie pour le Maroc de se qualifier pour deux éditions consécutives de la Coupe du Monde ?

Cela signifie que nous sommes organisés et que nous respectons le plan que la fédération a dessiné pour nous. Le président a joué un rôle vital, les résultats sont là pour le prouver. Aujourd’hui, nous sommes l’une des équipes incontournables en Afrique. Et participer à deux Coupes du Monde successives est une chose qui ne nous est plus arrivée depuis 20 ans.

Comment avez-vous préparé l’équipe nationale en aussi peu de temps ?

Comme je l’ai dit en conférence de presse, nous ne sommes pas là pour trouver des excuses. Notre objectif est de faire de notre mieux en Coupe du Monde et de permettre à nos fans d’être fiers de nous.

Que pensez-vous de vos adversaires dans ce groupe ?

Nous avons les finalistes et les vainqueurs de la petite finale d’il y a quatre ans. Je crois qu’il n’y a pas besoin d’en dire plus. Chaque équipe a ses forces et ses faiblesses. À nous de les repérer et je vous l’assure, nous allons nous préparer aussi bien que nos moyens nous le permettent.

Pour finir, une Coupe du Monde réussie pour le Maroc, ça ressemblerait à quoi ?

Si nous nous qualifions pour le deuxième tour, quelque chose que le Maroc n’a réussi à faire qu’une seule fois dans son histoire, en 1986, on pourrait considérer ça comme une réussite. Mais ça ne va pas être facile du tout, car ce groupe est compliqué. Nous allons nous battre, mais il est difficile de faire des promesses. La seule chose que je peux promettre, c’est que nous allons tout donner. Nous aurons une stratégie pour chaque match et les joueurs la connaîtront. Évidemment, nous voulons que tout le pays puisse être fier de nous et nous allons essayer de gagner le plus de matches possibles. Nous avons de l’ambition. (FIFA.com)