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La FIFpro a dressé un bilan alarmant du métier de footballeur en Europe de l’Est dans une étude rendue publique mardi à Bruxelles. Selon le syndicat mondial des footballeurs professionnels, en moyenne, au moins un footballeur par équipe est victime de violences physique ou mentale.

Il ne fait pas bon être footballeur en Europe de l’Est. C’est le résultat d’une étude réalisée par la FIFpro. Derrière les salaires faramineux comme Samuel Eto’o se cache en effet une réalité beaucoup moins rose. « 15% des joueurs ont été forcés de s’entraîner tout seul (séparés du reste de l’équipe) 11,7% d’entre eux ont été victimes de violences (dont 33% directement initiées par leur club) 10,2% des joueurs ont été victimes d’intimidation et de harcèlement », note le syndicat des joueurs dans un livre noir consacré aux footballeurs professionnels évoluant en Europe de l’Est.

« En moyenne, cela signifie que dans chaque équipe qui rentre sur le terrain, il y a au moins un joueur qui a été victime d’une forme ou d’une autre de violence physique ou mentale », estime le syndicat. L’étude, réalisée en octobre et novembre dernier, concerne 12 pays (Bulgarie, Croatie, République Tchèque, Grèce, Hongrie, Kazakhstan, Monténégro, Pologne, Russie, Serbie, Slovénie et Ukraine). Ces joueurs harcelés ou maltraités deviennent autant de proies plus vulnérables à la corruption, souligne la FIFpro.

Le livre noir, truffé de témoignages de joueurs, donne ainsi la parole à Dragisa Pejovic, un joueur serbe de 29 ans, qui a porté les couleurs du club du FK Borac Cacak pendant six ans. « Pendant six ans, il y a eu beaucoup de fois où les joueurs ont été contraints de truquer des matches. Celui qui ne le voulait pas était exclu de l’équipe. J’ai joué des matches truqués non pas parce que je le voulais, mais parce que je devais le faire. Si je n’avais pas joué, je n’aurais pas eu de salaire et donc pas pu aider ma famille », explique-t-il.

« L’an dernier, j’ai été victime d’une agression physique de la part du directeur du club, devant les autres joueurs. On m’a aussi fait chanter et on m’a trompé quand j’ai reçu des offres de transfert. Je n’ai pas été autorisé à partir car des individus au club demandaient de l’argent en contre-partie. Maintenant je suis heureux de ne plus être un joueur professionnel, même si j’étais un des meilleurs défenseurs du championnat serbe », relate Pejovic.

3. 357 témoignages anonymes

Dans un clip vidéo qui fait froid dans le dos, la FIFpro revient sur quelques incidents qui ont marqué ces dernières années, de Djibril Cissé au Panathinaïkos à Roberto Carlos à Anzhi. On y revoit notamment les images de Nikola Nikezic, l’ancien Havrais a qui avait été contraint, sous la menace, de résilier son contrat avec le club russe du FC Kuban. En 2011, il n’est plus autorisé à s’entraîner avec le club professsionnel et reçoit de nombreuses menaces.

Finalement, après avoir été battu pendant 20 minutes, il signe un document qu’il ne comprend pas, avait-t-il raconté à l’époque sur le site de la FIFpro, photos de son corps meurtri à l’appui. On y voit également des images d’Ilias Kotsios, un footballeur grec qui fond en larmes en pleine de conférence de presse après avoir reçu pendant des mois des menaces venant de supporters de son ancien club, l’OFI Crète. « C’était une guerre contre moi, ma famille et mes enfants », témoigne-t-il.

Le livre noir de la FIFpro souligne que, de manière générale, les retards de salaires – très fréquents en Europe de l’Est – sont à l’origine de dérives pouvant déboucher sur de la corruption. « Sur les 3. 357 footballeurs qui ont bien voulu collaborer à notre enquête, 41,4 % ne sont pas payés en temps et en heure », indique la FIFpro. Le syndicat mondial relève que les footballeurs concernés ne « gagnent pas des centaines de milliers d’euros », mais ont des revenus moyens qui ne les rendent « pas indépendants financièrement ».

« Le crime organisé opère de manière exponentielle dans le milieu du sport. (. ) 11,9% de l’ensemble des joueurs ont admis avoir été approchés pour truquer un match », constate la FIFpro. Or, « un joueur qui attend son salaire a plus de chances d’être approché pour manipuler un match. (. ) L’étude montre que le nombre de joueurs contactés augmente à mesure qu’augmente en parallèle la durée du non-paiement des salaires. Pas moins de 55% des joueurs qui ont été approchés n’avaient pas reçu leur salaire à temps », développe le texte.