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Hervé Renard, sélectionneur Français de la Zambie et vainqueur de la CAN 2012, poursuit actuellement l’aventure à la tête de la sélection Zambienne, actuellement en pleine phase de qualification pour la coupe du monde pour décrocher leur sésame Brésilien.

Le coach de 44 ans, qui fut longtemps l’adjoint de Claude Le Roy, prouve qu’il a l’étoffe pour réussir sur le devant. Hervé Renard a bien voulu répondre à nos questions sur sa situation personnelle, sur la sélection Zambienne ainsi que sur le Football Marocain. Interview:

Lions de l’Atlas : Entrons sans plus tarder dans le vif du sujet. Après avoir gagné la CAN 2012 avec la Zambie, quels ont été les objectifs personnels et ceux dictés par la fédération Zambienne?

Hervé Renard : Nous nous sommes fixés les mêmes objectifs, l’objectif principal étant de se qualifier à la coupe du monde.

J’étais en fin de contrat après la victoire à la CAN et la fédération m’a proposé un renouvellement de contrat avec donc pour objectif la CAN 2013 et surtout la qualification à la coupe du monde 2014 qui serait une première pour la Zambie. Chose qui était difficile étant donné le groupe où figure le Ghana.

Justement, dans votre groupe de qualification au Mondial, votre dernier match reste une contre performance et vous relègue à un point du Ghana.

Hervé Renard : Oui, on ne peut s’en prendre qu’à nous même si on en est là, c’est de notre faute mais j’espère qu’on n’aura pas à le regretter. Je reste persuadé qu’on est capable d’obtenir un grand résultat au Ghana.

Sachant qu’il y avait moyen d’être dans une meilleure position puisqu’on a perdu 2 points à Lésotho à la 87eme minute, puis 2 points chez nous face au Soudan alors qu’on a eu un nombre incalculable d’occasions, un peu à l’image de notre CAN 2013. Donc, pas d’excuses, c’est juste qu’on n’a pas su être efficace !

Sa situation

Avec votre expérience africaine réussie grâce à ce titre obtenu, avez vous eu des sollicitations et notamment venant d’Europe?

Hervé Renard :Oui, l’AJ Auxerre m’avait contacté de suite après le titre obtenu avec la Zambie en 2012, finalement, c’est Jean Guy Walleme qui avait pris les fonctions.

J’avais été contacté avant mais il restait seulement 12 matchs et le club était dans une situation délicate.

J’ai donc jugé que je n’avais pas grand chose à gagner en relevant un tel challenge. Moi je préférerais prendre en mains une équipe dès le début du championnat pour pouvoir prouver ce que je suis capable de faire.

Il est vrai que j’ai eu aussi des propositions très lucratives, mais j’ai préféré rester en Zambie et relever ce challenge de qualifier l’équipe pour son premier mondial.

J’ai fais abstraction de l’aspect financier même si ce n’est pas toujours facile, mais on ne peut pas toujours tout avoir. J’ai choisi donc l’aspect sportif.

Ce qui est tout à votre honneur, c’est chose rare dans le football actuel où on nous parle à tout va de l’aspect financier du milieu du football.

Hervé Renard : Disons qu’il faut savoir faire des choix, et j’ai réfléchis sur le long terme plutôt que sur le court terme. Je suis un « jeune entraîneur » donc j’ai encore pas mal de choses à prouver. Il faut faire attention de ne pas s’enterrer et donc j’ai résonné en terme sportif et stratégique pour ma carrière.

Et je pense que j’ai fais le bon choix même si on est actuellement second derrière le Ghana. Je ne regrette pas parce qu’on a vécu de superbes choses.

Maintenant si on ne se qualifie pas, la Zambie ne se sera une nouvelle fois pas qualifiée pour un mondial, ce ne sera pas catastrophique mais dommage. Une déception pour moi et mon équipe, parce que comme je vous l’ai dis auparavant, on avait les moyens de mieux faire.

Votre situation actuelle, quelle est elle?

Hervé Renard : J’ai encore un contrat jusqu’en Août 2014, mais vous connaissez le monde du Football. Donc commencer des éliminatoires pour la CAN 2015 pour seulement 6 mois ne rimerait à rien. Alors soit après le dernier match de qualification face au Ghan. On se met autour d’une table ou non pour la coupe du monde et on me prolonge pour pouvoir réaliser d’autres objectifs comme la CAN 2015 qui aura lieu au Maroc justement. Et pourquoi pas la coupe du monde un peu plus loin.

Maintenant, si on ne me le propose pas, ça ne servirait à rien de prolonger l’aventure plus loin que le match de septembre au Ghana si on ne se qualifie pas pour le mondial Il faudra réfléchir intelligemment et prendre une décision le plus vite possible.

Lions de l’Atlas

Aujourd’hui, les Lions de l’atlas n’arrivent toujours pas à sortir de leur longue traversée du désert. Le sélectionneur actuel, Rachid Taoussi, essuie pas mal de critiques. Son avenir à la tête de la sélection n’est pas assuré. Quel est votre regard sur le Football Marocain?

Hervé Renard : Déjà pour ironiser un peu, tous les sélectionneurs sont critiqués (rire!). J’ai été critiqué deux mois avant de gagner la coupe d’Afrique. Et puis je le suis un peu maintenant parce qu’on est deuxième.

Vous pouvez imaginer que la Zambie, qui n’avait jamais rien gagné avant aujourd’hui, a une CAN à son palmarès. On peut dire qu’ils ont un peu la mémoire courte, c’est un peu le métier de journaliste qui veut ça.

Je subis un peu ce que le coach du Maroc subit, maintenant je le connais personnellement et je l’apprécie beaucoup. Humainement, il est très intéressant.

Il m’est difficile de juger de l’extérieur son travail. La seule chose que je peux dire c’est de savoir pourquoi le Maroc peine à obtenir des résultats avec une équipe qui possède autant de qualité.
Je n’ai pas la réponse malheureusement, il faut être dedans pour l’avoir et encore. Parfois même de l’intérieur, on n’arrive pas forcément à savoir pourquoi.

Donc, on peut dire que vous suivez l’évolution du football marocain.

Hervé Renard : Oui en effet, je suis le Maroc de très près. Déjà parce que je pense que la Coupe d’Afrique 2015 sera une grande Coupe d’Afrique et parce que c’est un pays de Football avec d’excellentes infrastructures.

C’est aussi un pays qui est ouvert au tourisme, il est francophone et pour un francophone comme moi, c’est idéal. Pour répondre à votre question, bien sûr que oui, je suis le Maroc avec attention. Et de ma place, je me demande pourquoi ce pays peine autant avec autant de talent.

Dans les Medias Marocains, certains font le forcing pour placer Luis Fernandez et d’autres Eli Baup. Mais votre nom circule aussi en coulisse. Seriez-vous intéressé par ce poste à l’avenir?

Hervé Renard : Merci alors merci. Mais c’est 2 profils différents entre Luis et moi. Je dirais tout d’abord qu’il faut respecter l’entraineur en place qui est sous contrat. Il sera pour le moment à la tête de la sélection Marocaine à la CAN 2015.

Donc, je dirais que si un jour il y avait une décision prise par le Maroc et que de mon coté, je sois libre, bien sûr que ça m’intéresserait. Parce que c’est un pays magnifique et surtout parce que je pense qu’il y a moyen de faire quelque chose.

Je suis venu en stage avec l’USM Alger à Rabat, au complexe Mohamed V où il existe des infrastructures exceptionnelles, surtout pour un pays Africain.

Avec un travail de fond qui a déjà été engagé.

Hervé Renard : Oui et ce travail engagé va finir par payer parce que je connais très bien Nacer Larguet. On a été au même club formateur qu’est l’AS Cannes. Aussi Jean Pierre Morlans qui est DTN avec tout ça. Ce n’est pas possible qu’il n’y est pas de grands talents qui sortent et qui redonnent au Maroc la place qu’il mérite.

Comme vous avez pu le dire, le Maroc possède un vivier important de joueurs, au maroc et en Europe. Comment se fait-il qu’il n’arrive pas à réaliser ce que vous, vous avez réalisé avec la Zambie par exemple?

Hervé Renard : Le plus difficile c’est de mettre tout le monde dans un projet commun et de « former » une équipe. Je ne suis pas le premier ni le dernier à vous dire que les individualités ne font pas gagner une équipe. Par contre des individualités au service d’un collectif, ça fera la différence et fera gagner. Ce qui a fait la différence pour que la Zambie gagne, c’est l’état d’esprit.

Comment avez vous géré les choses pour construire cette équipe?

Hervé Renard : Je suis un entraineur très rigoureux. C’est à dire que le joueur qui joue en Europe peut réaliser de superbes choses, à partir du moment ou il revêtit le maillot de l’Equipe Nationale, il se doit d’être irréprochable.

Certains pensent qu’ils sont titulaires d’office parce qu’ils jouent dans des clubs européens. Mais il ne faut pas oublier qu’en football il y a des complémentarités et un équilibre à respecter. Si les joueurs ne sont pas capables de le comprendre à un moment donnée, quelque soit l’entraîneur, on ne peut pas gagner.

On dit que vous n’êtes pas un homme de compromis, que vous êtes genre à décider et à trancher. Au Maroc nombreux sélectionneurs n’ont pu s’imposer ou imposer leurs propres idées, comment gérer vous ce genre de situation ?

Hervé Renard : Tout est une question de charisme je pense. Il faut imposer ses idées et les faire respecter. Ça n’empêche pas de savoir écouter, vous dites que je suis quelqu’un d’intransigeant !

C’est vrai, mais j’écoute aussi. J’ai un président qui a été un grand joueur (ndlr kahloucha bwalia). Il me donne son avis mais c’est moi qui décide. C’est comme ça que je conçois mon travail. L’écoute en fait parti. Un sélectionneur doit écouter les diverses avis, mais à la fin, il est le seul à trancher. Si on tranche avec les idées des autres et pas les siennes, je ne vois pas comment on peut réussir.

C’est ma philosophie. Toutefois, je suis prêt à écouter énormément de personnes si leur discours est cohérent. Je ne suis pas un dictateur (rire) j’ai des idées bien précises.

Donc pour gagner en football, il y a des choses à respecter. Ce n’est pas parce que certain on des noms à avancer que ça fera avancer l’équipe. Souvent, ça ne fera rien avancer.

Avec toujours le problème de savoir qui faire jouer au final.

Hervé Renard : Pour moi, il y a un problème de taille. C’est le cas des joueurs venant d’Europe. Il ne faut pas qu’il y ait trop de joueurs qui n’ont jamais mis les pieds ou peu au Maroc. Et qui viennent porter le maillot de l’équipe nationale juste pour la vitrine que ça apporte.

Il faut privilégier les enfants du pays qui auront à cœur de défendre les couleurs de leur pays. Trouver le juste équilibre, c’est mon avis. Je pense qu’ils n’ont pas forcément l’identité nationale à 100% jusqu’au bout des ongles.

Lions de l’Atlas

Et si les Lions de l’Atlas ou un club de Botola vous contactent comme le Raja, le Wydad ou les FAR par exemple ?

Hervé Renard : Aujourd’hui non (rire). Après le match du 7 septembre, je vais vous répondre franchement si on ne gagne pas au Ghana… Le Maroc est certainement l’un des plus beaux pays dans lesquels on puisse travailler en Afrique.

C’est plutôt flatteur pour le Maroc.

Hervé Renard : C’est la vérité en fait, on pourrait comparer mais on ne va pas citer de nom. Je pense que vous savez comme moi ce qu’il en est.

C’est rare de trouver un pays avec de telles infrastructures et avec une qualité de vie tout en étant à proximité de la France. Et pour un Français, c’est un peu l’endroit idéal. Je sais aussi que Vahid Hallilodzic, quand il était à la tête du Raja, a gagné la Champion’s League. Il y a du potentiel. Je suis persuadé qu’en travaillant correctement, on peut obtenir de grands résultats avec ce pays.

Un dernier mot à nos Lecteurs dont une large majorité vous plébisciteraient en tant qu’homme de situation en cas de changement.

Hervé Renard : Merci de votre confiance. J’espère que les gens qui sont amenés à prendre les décisions penseront la même chose et auront le même point de vue. Vous savez qu’on peut être aimé mais que si on n’est pas élu, ça ne sert pas à grand chose.

Lionsdelatlas : Je vous remercie vivement d’avoir pris de votre temps pour répondre à nos questions. Je vous souhaite pleine réussite avec la Zambie dans un premier temps et par la suite dans vos prochains défis. Qui sait, un jour avec le Maroc.

Hervé Renard : Hé bien écoutez InchaAllah comme on dit ce serait un grand plaisir, Merci à vous à bientôt

Interview réalisée par l’équipe Lions de l’Atlas.