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Malgré des bons résultats à la pelle, le chantier ne fait que commencer: la sélection marocaine de football, portée par les champions de sa diaspora, entend préparer l’avenir en sortant davantage de talents locaux grâce à des infrastructures dernier cri, et la mise en place d’un plan de formation ambitieux.

A voir les tractopelles à l’oeuvre au milieu des arbres du centre technique national de la Fédération, situé dans la paisible forêt de la Maâmora, à une quarantaine de kilomètres au nord de Rabat, difficile de croire que le football marocain vit la période la plus faste de son histoire avec toute cette agitation. En l’espace de trois mois, les « Lions de l’Atlas « ont d’abord mis fin à 20 ans de disette en se qualifiant pour le Mondial en Russie, puis le Wydad Casablanca a remporté la Ligue des champions d’Afrique, avant que la sélection composée uniquement de joueurs locaux ne décroche le CHAN-2018 (championnat d’Afrique des nations) à domicile. « C’est beau mais l’enjeu est de structurer tout ça », explique Faouzi Lekjaa, président de la Fédération marocaine (FRMF). Et pour cela il n’y a pas de secrets, il faut faire un travail de fond. On veut éviter la logique de résultats accidentels, et aller vers la pérennité. « Pourquoi si vite ? « Parce qu’au Maroc, on a un problème. Souvent quand on atteint ce niveau de performance, on se relâche et on va dormir pendant dix ans », renchérit le DTN Nasser Larguet, l’homme recruté en 2014 pour assurer la transformation du foot local. Pour éviter d’attendre encore deux décennies avant de participer de nouveau à une Coupe du monde, le Royaume a d’abord décidé de se doter d’infrastructures à la hauteur de ses ambitions. Outre la construction d’un hôtel pour la sélection A, d’un centre médico-sportif, ou encore de plusieurs terrains couverts pour « mettre à niveau « son « Clairefontaine », la FRMF vise la mise en place de 99 terrains synthétiques, 12 terrains en gazon et 5 centres fédéraux de formation sur l’ensemble du territoire. Coût total du projet ? 150 millions d’euros. « On a beau avoir des terrains, des bâtiments, si vous n’avez pas les hommes, c’est voué à l’échec », prévient toutefois Nasser Larguet. « Aujourd’hui c’est vraiment le moment où il faut passer un palier, et celui-ci ne peut être passé que par les ressources humaines. « Pour se renforcer dans ce domaine, l’ancien directeur du centre de formation de Rouen, Cannes, Strasbourg et Caen, a lancé un département de « formation de cadres « (entraîneurs de jeunes, préparateurs physique…). Outre la possibilité de délivrer la licence pro CAF, diplôme d’entraîneur le plus élevé du continent africain, un accord avec le Centre de droit et d’économie du sport de Limoges a été signé pour former des « stadium manager », ou encore « des responsables administratifs et financiers ». Le projet s’accompagne surtout d’une mise en place d’un programme de formation ambitieux pour notamment ne plus dépendre totalement des talents issus de la diaspora (France, Pays-Bas, Belgique, Espagne…). Selon un rapport du Centre international d’étude du sport de Neuchâtel, 61,5% des joueurs ayant participé aux éliminatoires du Mondial-2018 sont nés à l’étranger. Presque le double du Sénégal (39,4%), seconde nation la plus friandes en binationaux ! « Les binationaux sont 100% marocains quand ils viennent jouer en équipe nationale. Ils ont tout à fait leur place avec nous. Par contre il ne faut pas oublier, comme on l’a fait pendant une dizaine d’années, de faire le travail localement », reconnaît Nasser Larguet, qui se refuse toutefois à toute « opposition ». « Nous devons faire progresser nos jeunes pour qu’ils aient eux aussi la chance d’aller en équipe nationale. On l’a vu avec le CHAN, nous avons le potentiel pour qu’il y ait des joueurs locaux vers les A », ajoute-t-il. Inspiré « à 80% du modèle français « mais adapté à « l’état d’esprit marocain », le plan suggère aussi le déploiement de DTN régionaux chargé de mettre en oeuvre à leur échelle la politique nationale, ou encore la création de cinq nouvelles sélections avec les U15 ou encore les U20 et U17 féminines. « Je pense qu’au niveau du potentiel brut, on a beaucoup de talent. Il suffit juste de le travailler correctement dans des chaînes de formation professionnelle », souligne M. Lekjaa. Il n’y a aucune raisons pour ne pas avoir des grands joueurs ici au Maroc comme on en a eu d’ailleurs historiquement. »